Bargny face à la centrale à charbon : l’espoir d’une justice attendue

 

Ce jeudi, la Cour suprême du Sénégal examine un dossier d'une importance capitale pour l'avenir de Bargny et de ses habitants. Depuis plus de dix ans, cette communauté riveraine se bat contre l'implantation d'une centrale à charbon, qui, selon les associations environnementales locales, constitue une menace majeure pour la santé publique, l'économie locale et l'équilibre écologique de la zone. 

Une centrale au cœur des controverses environnementales 

Située à moins de 500 mètres des habitations et des écoles, l'usine à charbon de Bargny est accusée de violer les réglementations environnementales en vigueur. La pollution atmosphérique et sonore causée par cette installation industrielle affecte directement plus de 70 000 habitants. 

Les effets de cette pollution ne se limitent pas à la qualité de l'air. La proximité de la centrale avec le site de transformation de Khelcom, où travaillent des milliers de femmes, expose les produits halieutiques à des hydrocarbures et à des particules de cendres toxiques. L'impact sur la pêche, qui constitue une activité économique essentielle pour la région, est dévastateur. 

Par ailleurs, la construction de cette centrale a mobilisé 29 hectares de terres initialement destinées à l'agriculture et à l'habitat pour les victimes de l'érosion côtière. Cet accaparement foncier prive les populations de ressources vitales, aggravant encore leur vulnérabilité face aux changements climatiques. 

Le combat des associations environnementales 

 Depuis une décennie, le Réseau des associations pour la protection de l'environnement et de la nature (Rapen) mène une lutte acharnée contre cette centrale, dénonçant son impact catastrophique sur l'environnement et la santé des populations. Le combat du Rapen est renforcé par le soutien de Natural Justice, une organisation engagée dans la défense des droits environnementaux des communautés affectées par des projets industriels. 

Leur action repose sur des arguments solides : le droit à un environnement sain est consacré par la Constitution du Sénégal et reconnu par la résolution du 26 juillet 2022 de l'ONU. Natural Justice rappelle que les autorités sénégalaises ont l'obligation de respecter ces engagements et de protéger les citoyens contre les nuisances industrielles. 

Un verdict attendu comme une décision historique 

Ce procès devant la Cour suprême pourrait constituer un tournant décisif. Les communautés de Bargny attendent avec espoir une reconnaissance judiciaire de leurs souffrances et la mise en application des lois environnementales.

Les résultats d'une étude menée en 2022 par Natural Justice sur les impacts cumulatifs des installations industrielles à Bargny renforcent leur dossier. Cette analyse dresse un tableau alarmant des conséquences de la centrale : pollution thermique, dégradation de la qualité de l'air, destruction de l'écosystème marin, contamination des eaux et des sols, perte de terres agricoles, et fragilisation du tissu social.

L'issue de cette audience judiciaire est donc cruciale. Si la Cour suprême donne raison aux plaignants, cela pourrait marquer un précédent historique dans la reconnaissance des droits environnementaux des communautés locales face aux grandes infrastructures industrielles. 

En revanche, un rejet de leur requête renforcerait le sentiment d'abandon ressenti par ces populations, et poserait la question du respect effectif des engagements environnementaux du Sénégal. 

Une bataille pour la justice environnementale 

Le procès de ce jeudi est bien plus qu'une affaire juridique : c'est un combat pour la justice environnementale, sociale et économique. La centrale à charbon de Bargny symbolise les tensions entre développement industriel et protection des populations locales. L'espoir des Bargnois repose sur cette décision, qui pourrait, enfin, mettre un terme à dix ans de lutte pour un environnement sain et une vie digne.

Les yeux sont tournés vers la Cour suprême, qui a entre ses mains l'opportunité de rétablir les droits fondamentaux des habitants de Bargny et d'envoyer un signal fort sur la priorité à accorder à la justice environnementale au Sénégal.

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