va-t-on vers un protestantisme en Islam? Par Cheikh Ahmed Tidiane Sy Al Amine

 

De plus en plus des voix s’élèvent pour protester contre l’hégémonie d’un Islam soufi sous l’aile d’un « Clergé » composé de figures considérées par les adeptes des confréries comme les héritiers des fondateurs. Au-delà des activistes insulteurs très connus à travers les réseaux sociaux, on note un mouvement naissant prônant un islam aux allures égalitariste et contestant la hiérarchisation des rapports entre adeptes de l’Islam soufi et les maîtres spirituels que sont leurs cheikh.

Cela ressemble à maints égards à l’un des principes fondamentaux du Protestantisme le Solus Christus, qui considère Jesus Christ comme le seul intermédiaire entre l’humain et le divin.

L’Islam réformiste se réclamant des Ahlou Sunna dont il veut arbitrairement et contre toute réalité historique exclure les "soumis" fait appel à la référence prophétique comme la seule et unique qui vaille pour le musulman.

Jusqu’à faire croire que fondamentalement le soufi cherche par son guide, un intercesseur auprès de son Seigneur, l‘amalgame volontaire est vite entretenu et enveloppé d'un nuage de fumée fait de subjectivité et parfois de jugement de valeur.

En vérité, les principes fondamentaux de l’Islam reposant sur le corpus coranique, les différentes composantes de la Sunna et le consensus (ijmâ') restent immuables, dans l'entendement des musulmans, meme s’il faut reconnaître quelques dérives liées aux pratiques sociales finalement instituées et non aux fondamentaux comme l’avait d’ailleurs fustigé El Hadj Malick Sy dans son Ifham Al-Munkir Al-jani.

Ibn Taymiyya lui-même ne considère pas le soufisme comme une innovation blâmable (bidaa) mais relevant plutôt « d’états spirituels » remontant de l’époque du Prophète psl et de ses Compagnons. Sauf qu'il y a aujourd'hui une lecture sélective au point de devenir sectaire de ce penseur difficilement lisible sans une mise en perspective de sa pensée à travers le temps et les conjonctures.

Ainsi, fondamentalement ce qui pourrait s'apparenter à un "protestantisme islamique" ne s’oppose pas catégoriquement au soufisme. Toutefois, les différences de point de vue entre oulémas demeure une miséricorde pour l’humanité et persisteront jusqu’à la fin des temps sans justifier une quelconque animosité entre les communautés religieuses et au sein de celles-ci.

De la même manière que bien des marxisants ont fait de la pensée de Marx l'aspirateur de toutes les frustrations et l'ont chargée de toutes leurs préoccupations, certains néo-protestants musulmans se sont agrippés, parfois de manière anachronique et sélective à une pensée dont ils ont fini par mutiler le sens et la quintessence.

Ce qui diffère d’un mode de pensée peut déranger, Mais quand la personnalisation de la haine se manifeste et trahit par le langage et l'attitude, on ne peut plus raisonner ceux qui seraient peut être atteint de la pire des cécités; celle du cœur (فإنها لا تعمى الأبصار ولكن تعمى القلوب التي في الصدور)

L’avènement de mouvements réformistes islamiques au Sénégal constitue-t-il une menace pour les confréries soufies? A l’instar du protestantisme qui a cheminé avec le catholicisme depuis plusieurs siècles, le soufisme continuera à vivre avec toutes les formes de réformisme islamique car, fondamentalement le protestantisme islamique ne s’oppose pas au soufisme.

Entre soufisme et réformiste il s’agirait moins de querelles des textes que de chocs des cultures comme aurait pu dire Seydi Diamil Niane. 

« Évitons d’intellectualiser la médiocrité, la haine et la jalousie. » comme disait Al Maktoum.

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