Loi d'amnistie: " on n’amnistie pas des personnes mais des faits" (Me Ousmane Sèye )

 

La mesure annoncée par le chef de l’État Macky Sall pour permettre à Khalifa Sall et Karim Wade de retrouver leurs droits civiques et politiques continue de susciter des réactions dans la scène politique sénégalaise. Si certaines personnes trouvent cette mesure salutaire d’autres pensent le contraire. C’est le cas de l’avocat Maitre Ousmane Sèye. 

 Pour la robe noire, il est impropre juridiquement d’amnistier Khalifa Sall et Karim Wade. 

« Quand on prend une loi d’amnistie, cette loi doit viser des faits dans un temps précis. Ces faits doivent être cantonnés dans un temps précis. Et toutes les personnes qui ont commis des délits et des crimes dans ce temps précis, bénéficient de l’amnistie. C’est pourquoi on n’amnistie pas des personnes mais des faits. Cela veut dire qu’aujourd’hui, il est impropre juridiquement de parler d’amnistier Karim Wade et Khalifa Sall. Pourquoi ? Parce que l’amnistie ne vise pas des personnes mais des faits. Il faut maintenant que si on fait un projet de loi portant amnistie, ce projet de loi précise les faits qui sont amnistiés.  Or ce que je sache, les faits reprochés à Karim Wade et Khalifa Sall sont des délits. Est-ce qu’on va amnistier ces délits ? Quels sont les événements qui sont intervenus pour que ces personnes commettent ces délits. Ce sont ces évènements que doit viser le législateur pour amnistier ces faits. On n’amnistie pas des délits, ça serait extrêmement grave. Cela signifierait que certaines personnalités politiques bénéficient d’une impunité totale et ils ne sont pas au-dessus de la loi. Maintenant ces faits commis par Karim Wade et Khalifa Sall ont été punis par la loi de manière définitive. Mais subsidiairement, ce n’est ni la justice, ni le président de la République ni l’assemblée nationale qui ont établi des peines complémentaires contre Karim Wade et Khalifa Sall. C’est le Code électoral dans ses articles L29 jusqu’à L31. Quand une personne est condamnée pour un tel délit, il ne peut plus s’inscrire sur les listes électorales », a souligné Me Ousmane Sèye.

Pour l’avocat qui dit approuver l’idée de permettre aux deux leaders politiques de retrouver leurs droits, précise que le chef de l’État peut le faire sans recourir à une loi d’amnistie. Mais plutôt en modifiant le code électoral en ses articles 29 et 31. Cependant, pour le juriste, vouloir amnistier Khalifa Sall et Karim Wade serait un précédent dangereux pour les hommes politiques. 

 « Je suis d’accord pour qu’ils retrouvent leurs droits civils et politiques. Il faut actionner le code électoral en ses articles L.29 et L.31 parce que ce sont ces dispositions qui font que ces personnes ont perdu d’une manière permanente leurs droits civils et politiques. S’il faut les réhabiliter politiquement, il faut modifier ces articles. Ceci pour fixer la durée pendant laquelle une personne qui perd ses droits civils et politiques peut les retrouver au bout de cinq voire dix ans. On en a discuté au niveau du dialogue politique. Il ne faut pas créer un précédent dangereux pour les hommes politiques. Parce qu’ils ne seront pas les seuls à en bénéficier. Et il faudra préciser les faits pour lesquels ils doivent être amnistiés. On ne peut pas se réveiller un bon matin, condamner quelqu’un pour enrichissement illicite ou bien détournement de bien publique et les amnistier. Demain chaque sénégalais condamné pour ces délits peut demander une amnistie. Je suis d’accord pour la décrispation de l’arène politique. Je suis d’accord aussi pour leur réhabilitation », précise toutefois Me Ousmane Sèye

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