Dans une récente contribution intitulée « Fermons la page des élections territoriales, les législatives arrivent », nous avions évoqué des contraintes au plan juridique et technique à organiser les élections législatives au mois de juin tel qu’annoncé par le président de la République à l’occasion de son adresse à la Nation du 31 décembre 2021.
A l’appui de notre argumentaire, il a été souligné, entre autres, la date de déclaration des candidatures (70 jours avant le scrutin), la période de collecte des parrainages (un délai raisonnable) et celle de la révision exceptionnelle des listes électorales ainsi que l’obligation de respecter la durée du mandat des députés fixée par la Constitution.
Ainsi la problématique soulevée ne réside pas sur l’éventualité d’un report des élections. Elle pose la conformité de la date à fixer pour leur tenue. En effet, l’échéance de Juin 2022 indiquée par le président de la République ne peut aucunement correspondre aux exigences du code électoral même si, comme tout le laisse croire, il a voulu rassurer les Sénégalais sur sa volonté à organiser les élections à date échue.
En vertu des dispositions de l’article L.155 alinéa premier du code électoral, « le mandat des députés de la l’Assemblée nationale est de cinq (5) ans » – une disposition tirée de la Constitution, en son article 59. De plus, l’alinéa 2 de l’article précité énonce que « les pouvoirs de l’Assemblée nationale expirent le jour de l’installation de l’Assemblée nationale nouvellement élue. »
A titre de rappel, la disposition qui prévoyait l’expiration des pouvoirs de l’Assemblée Nationale au plus tard le trente (30) juin de la cinquième année qui suit son élection (…) a été abrogée en 2017. Précisément, l’article L.156 dispose : « les élections générales ont lieu entre les soixante (60) et vingt (20) qui précèdent la fin du mandat ».
Il y a lieu de souligner que cette disposition découle de nos propositions formulées lors des travaux de la commission technique de revue du code électoral (CTRCE) en 2009 et 2011 et intégrée dans le code électoral de 2012. En son temps, la proposition était sous-tendue par le souci d’organiser les élections législatives bien avant l’expiration du mandat des députés. Pour cela, il était nécessaire de fixer un intervalle temporel.
Pour des contraintes de délais, le code électoral de 2017 a dû déroger à cette disposition (Voir dispositions transitoires, article L.355). Les dernières élections législatives ont eu lieu le 30 juillet 2017, la proclamation des résultats définitifs par le Conseil constitutionnel est intervenue le 14 août 2017. Par la suite, les députés élus à l’issue du scrutin ont pris fonction officiellement le 14 septembre 2017 lors de la session d’installation de la 13e législature. Par conséquent, le renouvellement du mandat des députés doit intervenir au plus tôt le dimanche 17 juillet 2022 et le dimanche 21 août 2022 au plus tard.
Voilà le débat que nous avons posé au lendemain des élections territoriales tout en constatant leur chevauchement avec les prochaines législatives. Dommage que la plupart des acteurs ne soient pas dans l’anticipation…
Il en va de même à propos du cumul de positions de tête de liste à la ville et à une des communes constitutives. Nous avions pourtant maintes fois alerté bien avant que l’accord entre les acteurs politiques ne soit acté dans le code électoral.
Pour les besoins de l’applicabilité de la loi sur la parité dans les bureaux des conseils départementaux et municipaux, nous tenons à suggérer que les élus qui se trouvent dans cette situation de cumul fassent leur option avant leur installation.
Par ailleurs, il est évident qu’en imposant aux coalitions de partis politiques et aux entités regroupant des personnes indépendantes de déposer les signatures recueillis pour le parrainage au moment de la notification du nom de la coalition ou de l’entité, les dispositions de l’article L.149 du code électoral instaure une rupture d’égalité entre les listes de candidats.
Quand bien même, cette disposition favoriserait ces entités du fait de l’avantage de l’antériorité du dépôt des parrainages selon le système de vérification et de contrôle. Il est avéré que cette disposition remet en cause le principe d’égalité des listes de candidatures. Celui-ci est un principe fondamental du droit électoral.
Au surplus, ces dispositions sont contradictoires avec celles prévues par l’article L.174-6 du code électoral qui citent les fiches d’électeurs parrainant les candidatures parmi les éléments du dossier de candidature.
Le 1er février 2022
Ndiaga SYLLA,
Expert électoral
Président de Dialogue Citoyen